samedi 7 février 2015

Il y a un mois, Charlie...

Nous sommes le 7 février 2015. La radio me [Richard] rappelle qu'il y a un mois deux terroristes décimaient la rédaction de Charlie Hebdo, un troisième massacrait à Montrouge une policière municipale et 4 clients d'un hypermarché casher à la porte de Vincennes. La réponse à ce massacre a été la mobilisation de près de 4 millions de personnes les 10 et 11 janvier.

Nous avions dans notre blog, à notre manière, rendu hommage aux victimes de ces massacres. En France et dans le monde, des millions de voix se sont élevées pour défendre la liberté d'expression et dénoncer la bête immonde de l'antisémitisme.

La rue a témoigné de ce terrible choc. Des "Je suis Charlie" ont été peints sur les murs de nos villes, imprimés sur des banderoles, écrits sur nos monuments, sur de simples feuilles de cahier arrachées à des cahiers d’écolier. Bref, tous les supports étaient bons pour afficher la  solidarité du peuple de France aux victimes.

Ce matin, je suis retourné rue Henri-Noguères, spot de street art où j'avais photographié des témoignages de l'adhésion des street artists à ce formidable mouvement dans une très large mesure spontané. J'ai photographié les affiches de dAcRuZ également pour faire un constat.



La grande fresque de la rue Henri-Noguères qui dénonçait tous les fanatismes religieux a été recouverte par des graffes. Le superbe Charlie de Treiz n'a pas été vandalisé mais le "Je suis", introductif à "Charlie" a été complété par les blazes des tagueurs.

Les deux affichettes de dAcRuZ collées sur le pont de la rue de l'Ourcq ont été en partie arrachées et l'une des deux est couverte par le dessin malhabile d'un bonhomme. L'affiche de moyen format collée sous le pont a été respectée tout comme celle collée sous le pont SNCF de l'avenue Jean-Jaurès.

Un constat bien difficile à interpréter de façon globale. Les fresques de la rue Henri-Noguères ont perdu leur caractère "sacré". La grande fresque qui reproduisait une caricature de Charlie Hebdo aurait pu avoir une valeur patrimoniale et être respectée comme un témoignage historique des terribles événements du début janvier. Plus lisible à mon sens, l'intention des graffeurs de décliner le "Je suis..." de leur nom de code dans le milieu fermé du street art. C'est une reprise de ceux qui se sont opposés à la mobilisation nationale. À moins que cela soit une simple bêtise et une manière d'afficher de manière provocatrice son blaze.

    


Quant aux affichettes lacérées de dAcRuZ, elles peuvent à mon sens manifester deux réactions : la première est sur le fond (la République laïque n'est pas la somme des trois principales religions monothéistes pratiquées en France), la seconde, un soutien aux terroristes. Reste que les deux plus grands formats de dAcRuZ, et par là, les plus voyants, ont été respectés. Non seulement, les affiches n'ont pas été déchirées mais elles n'ont pas été surchargées par des inscriptions et/ou des dessins.

             


Ces observations confirment ce que nous savions déjà : la population de notre quartier, cosmopolite, réagit par une constance dans l'adhésion aux valeurs qu'elle défendait dans la rue dans de gigantesques manifestations les 10 et 11 janvier. L'esprit Charlie n'est pas mort, il bouge encore. Une minorité ne s'interdit plus d'exprimer son soutien à "la lutte" des terroristes.

Les magasins qui affichaient "Je suis Charlie", rue de Meaux, ont enlevé leur ardoise et effacé leurs inscriptions. Bien sûr, on ne voit pas fleurir sur nos murs des slogans provocateurs. Les communautés tendent à devenir invisibles. 
L'absence est aussi significative que la présence. Sur nos murs, des murmures certes, mais un grand silence.
J'ai peur des silences.

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